accueil BIODANZA > textes > Edgar Morin le 16 juillet 2011
voir le plan du site de la Biodanza 3e Symposium de Biodanza en France
12-15 juillet 2011

1er Congrès Européen d'Éducation Biocentrique
15-17 juillet 2011
retour à la page précédente
conférence d'Edgar MORIN
Qu’est-ce que la connaissance ? Qu’est-ce qu’être humain ?

C’est alors qu’ont surgi dans le monde méditerranéen les religions du salut, c’est à dire non pas la vie amoindrie après la mort mais la résurrection sous réserve qu’on obéisse à des rites sur le modèle d’un dieu qui meure et ressuscite comme l’Osiris égyptien. Le fondement de la religion chrétienne se résume à ce qu’a exprimé Paul : si vous devenez chrétien, vous ressusciterez comme Jésus.
Dans toute l’humanité vous avez ce phénomène religieux. Si vous observez la société nord-américaine, vous constatez que, nulle part, la technique et la science ne sont plus développées et que nulle part, la religion n’est plus développée. Donc l’être humain n’est pas seulement un être technique, il est aussi un être religieux. Bien sûr, il y a plusieurs types de religions : les religions polythéistes qui, dans la plupart des continents, ont été remplacées par les religions monothéistes dont la source est hébraïque.
Dans les religions monothéistes, vous avez le christianisme et l’islam. Toutes deux promettent le paradis. Mais ces religions ont connu un relatif dépérissement, surtout le christianisme ; puis sont venues des religions « sans dieux ».
D’abord, il y eut une religion de la nation : culte de la nation avec drapeau, cérémonie, etc .. Et au siècle dernier, une autre est apparue : une religion de salut terrestre, le communisme qui promettait le bonheur et l’harmonie non pas au ciel mais sur Terre grâce à la révolution qui supprimerait l’exploitation de l’homme par l’homme.  Cette intention magnifique n’a pas pu se réaliser, elle a même été tragique. Je pense qu’on ne peut pas échapper aux religions, c’est à dire être relié les uns aux autres par un sentiment de communauté.
Aujourd’hui, on pourrait proposer une religion de la Terre patrie ; patrie est un mot intéressant, il commence de façon paternelle et se termine au féminin de façon maternelle : la mère patrie. Ces deux notions paternelle / maternelle fraternise comme le dit très bien le début de la Marseillaise : « allons enfants de la patrie » ; nous sommes des enfants, nous sommes fraternisés. S’il faut garder les patries, il y a surtout une patrie humaine, planétaire dans laquelle nous devons vivre en paix. Il faut vivre ce sentiment de communauté, d’enfants de la Terre, de citoyens de la Terre et c’est un nouveau type de religion.
 
C’est une religion non pas du salut mais de la perdition. Nous sommes perdus sur cette planète, nous ne savons pas pourquoi la Vie est née, nous ne savons pas pourquoi nous sommes nés, pourquoi nous mourons. Alors, soyons frères, soyons sœurs, parce que nous sommes perdus et non pas soyons frères, soyons sœurs  pour que nous soyons sauvés !
Dans la nature humaine, il y a cet aspect religieux, pas seulement avec des dieux, mais un besoin profond, ce besoin de reliance entre nous, de communauté. Ce sont nos aspirations fondamentales : plus d’autonomie, donc plus de liberté mais aussi plus de communauté. La liberté et la communauté ne suffisent pas isolément, nous aspirons à être à la fois autonomes et communautaires.
Si nous réfléchissons sur l’être humain, nous constatons que nous cherchons à réaliser la poésie dans la vie, dans la communauté et la liberté. Patrick Vibray ( ?) nous dit : dans notre civilisation nous oscillons entre l’hyper-excitation, le mouvement, l’énervement et la fatigue, la dépression, la mélancolie. Nous passons de l’excitation à la dépression de l’excitation. Nous cherchons à combiner la sérénité avec l’intensité ; la sérénité sans l’intensité est vide et l’intensité sans la sérénité produit trop d’excitation.
 
Si on continue à réfléchir sur ce qu’est être humain, on peut trouver un sens à cette vie, je ne pense pas à un sens caché qu’il faudrait trouver ; le sens de la vie est en nous-mêmes, le sens profond de la vie est le seul qui nous permette de résister à l’angoisse de la mort. La mort nous angoisse, ce n’est pas seulement la décomposition physique, c’est la disparition du « moi, je », ce « je » qui représente notre trésor personnel.
Qu’est-ce qui peut résister à la mort ? Le cantique des cantiques dit : l’amour est plus fort que la mort. Je crois que c’est un peu exagéré mais pour refouler les angoisses de mort, il faut la plénitude de la Vie, la plénitude de l’amour. Ce qui est important, c’est que si soi-même on meurt, les gens qu’on aime vont continuer. J’insiste encore sur le fait que cette réflexion sur ce qu’est être humain n’est absolument pas enseignée.

page 6 • >>> suite >>>
retour à la page précédenteretour en haut de cette page